dimanche 15 janvier 2017

Extrait #7 : La menace diaphane.

De retour à l’extérieur, l’adolescent se mit à la recherche d’un plan de ville. Il ne tarda pas à trouver son bonheur au centre d’une petite place. D’après la carte, la cité se décomposait en quelques grands quartiers, selon une structure pyramidale, tout autour du mont Wyn. Le secteur administratif se situait quant à lui dans la partie supérieure de la ville, accessible en train ou en monorail. Ice opta pour la seconde option, plus longue mais moins coûteuse. Il se dirigea sur l’un des quais surélevés, où allaient et venaient s’arrêter d’étroits wagons, glissant sous les larges poutres qui serpentaient Blanche-Cité. Une cité immense pour un nombre immense de transports… La Forêt de Péridot ne lui avait pas paru aussi labyrinthique. Au moins, là-bas, il avait dû compter sur ses pieds qui le guidaient là où il décidait d’aller.
Une navette arriva. Ice se rapprocha d’un pas hésitant, soudain assailli par le doute. Finalement, il préféra faire demi-tour pour s’assurer une énième fois de son itinéraire auprès d’un passant. Cela devait bien faire la dixième personne lui confirmant ce trajet… Soit. Mais tout de même ! La manière naturelle avec laquelle ils avaient tous acquiescé pouvait très bien avoir été un gage de désinvolture ! Ice soupira, crispé. Tant pis, il devrait s’en assurer tout seul.
Cinq minutes plus tard, à laisser l’adolescent en proie à ses hantises, le quai accueillit une nouvelle desserte. Ice s’aventura à bord du monorail, les yeux rituellement fixés entre la liste électronique des arrêts et les vitres du wagon vide. Les portes coulissèrent et la navette reprit son ascension. Sans rails sur lesquels s’allonger, celle-ci semblait tout bonnement s’envoler. Ice laissa l’altitude et le panorama le griser, oubliant peu à peu cette sensation acide qui lui rongeait jusqu’ici les tripes.
Le mont Wyn se dressait en une véritable tour urbaine, non moins naturelle : un géant minéral, corseté par le fer, le ciment et l’acier. Le génie humain s’était toutefois abstenu de conquérir le pic enneigé, comme le démontraient ses plus hauts versants, encore vierges.
Ice continuait de contempler la ville depuis son aplomb, quand une vision insolite capta subitement son attention : celle d’une avenue entièrement prisonnière sous d’épaisses couches de glace. Le froid avait avalé trains, métros, et autres wagons dans un immense estomac diaphane, engouffrant jusqu’à la toiture des bâtiments. Ice cheminait d’un regard hagard les immenses plaques de givres qui tapissaient les rues et recouvraient les façades. Celles-ci semblaient converger autour de plusieurs tunnels ferroviaires, encagés derrière de longues canines glaciales. Toutefois le gel n’avait pas tout pétrifié, comme le témoignaient les nombreux engins utilitaires ferraillant aux quatre coins du quartier. Quartier administratif qui plus était, dans lequel l’adolescent arrivait enfin. Sur le quai, Ice hésita. Lui valait-il mieux se rendre aux bureaux de l’Égide, ou passer en premier lieu à la mairie ? La mairie était plus proche.
Le hasard avait voulu que cette zone ait été épargnée des ravages. Dommage, l’épéiste se faisait une joie de progresser entre les murs congelés. La municipalité de Blanche-Cité n’avait rien de comparable à celle de Tal, qui à côté, avait l’air d’un simple chalet. Celle de la cité ressemblait bien plus à un manoir, sur lequel on avait placé les armoiries de la ville, bien en évidence, sous la forme de drapeaux ornés d’une corne d’abondance, accrochés haut sur la façade du bâtiment.
Le garçon fut, pour changer, aussitôt remarqué dès son entrée dans le hall. Un homme, aux allures de majordome, l’interpellait déjà.
– Ah, vous êtes là !
Ice se désigna du doigt, l’air badaud.
– Euh, moi ?
– Vous, monsieur. L’Égide nous a confirmé la visite d’un Défenseur, et vous êtes assidûment ponctuel. Le maire vous attend.
L’homme tendit le bras pour désigner un escalier tapissé. Ice haussa les épaules et se laissa accompagner. Décidément, l’Égide s’assurait toujours d’avoir une longueur d’avance. Il n’avait même pas eu besoin d’utiliser son TRM pour les contacter ! Tant mieux, ce gadget lui avait sérieusement pris la tête quand il avait tenté d’envoyer son dernier rapport.
Une fois l’étage traversé, le secrétaire frappa à l’ultime porte d’un couloir, avant d’annoncer le Défenseur d’Ozma. Une voix stricte et formelle traversa la cloison.
– Faites-le entrer !
– Je vous en prie, s’exprima le gentilhomme avec un petit geste de main.
Ice le remercia et pressa la poignée.

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